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Hervé Coudurier, responsable du département qualité de vie au travail, à France Travail : « Aider les aidants à se nommer pour mieux être reconnus »

Un actif sur quatre est ou sera concerné par la situation d’aidant. À l’occasion de la Journée nationale des aidants, le 6 octobre 2025, Hervé Coudurier expose dans sa tribune les actions et les enjeux portés par France Travail.

Publié le  01/10/2025

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Dans une organisation comme France Travail, nous sommes chaque jour confrontés à des situations humaines qui concernent l’inclusion. Parmi elles, on retrouve celle des aidants. Aujourd’hui, on estime qu’un actif sur quatre est concerné ou le sera prochainement. À l’échelle de France Travail, cela représente près de 15 000 personnes. Ces chiffres parlent d’eux-mêmes : nous ne pouvons pas ignorer cette réalité. 

Être aidant n’est pas un statut que l’on revendique facilement. Beaucoup de personnes concernées ne se reconnaissent pas comme telles. Elles estiment « aider simplement » un parent en perte d’autonomie, un enfant malade, un voisin vieillissant. Or ce geste quotidien, qu’elles vivent comme une évidence, a un nom : être aidant. Cette difficulté à se dire ou à se penser « aidant » constitue un premier obstacle. Car ne pas le reconnaître, c’est aussi passer à côté de droits, de dispositifs ou de soutiens que l’employeur peut mettre en place. L’une des missions, en tant qu’organisation, est donc d’accompagner cette prise de conscience : aider les personnes à se nommer, pour mieux être reconnues. 

« Au-delà des aménagements administratifs, le répit est un besoin vital. »


Le deuxième défi est celui de la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. Comment mener de front une carrière et un rôle d’aidant mobilisant temps et énergie ? Certains craignent d’être jugés moins investis ou moins performants. D’autres renoncent à des opportunités professionnelles par manque de flexibilité. Derrière ces situations individuelles se dessinent des enjeux collectifs : climat social, absentéisme, performance. C’est aussi la culture du travail qui est interpellée. Il nous faut sortir de l’idée qu’être aidant serait incompatible avec le fait d’être un bon professionnel. Reconnaître qu’on peut être pleinement investi dans son métier tout en accompagnant un proche, c’est faire évoluer nos représentations collectives. 

Face à ces constats, France Travail a progressivement mis en place des dispositifs spécifiques. Le premier date de 2015 : l’assouplissement des horaires pour les agents accompagnant une personne en situation de handicap. Depuis, l’accord « Qualité de vie au travail », signé en 2022, a marqué une étape décisive. Il élargit les possibilités d’aménagement, facilite le recours au télétravail et prévoit des jours supplémentaires pour offrir du répit. Car, au-delà des aménagements administratifs, le répit est un besoin vital. Savoir que l’on peut souffler, se reposer, prendre quelques jours pour soi est une condition essentielle pour tenir dans la durée. 

« Former et sensibiliser l’encadrement à ces réalités est une priorité.»Un guide spécifique a été publié pour informer et orienter les salariés aidants. Il recense les droits légaux, les dispositifs conventionnels et les ressources accessibles. Nous avons également développé une plateforme d’accompagnement, ouverte en 2024, permettant aux aidants d’échanger avec des assistants sociaux spécialisés. Et nous déployons en ce moment un dispositif innovant : le fonds de solidarité aidants. Alimenté à la fois par France Travail et par les dons anonymes de jours de congés effectués par des collègues, ce fonds permet d’octroyer du temps supplémentaire à ceux qui en ont le plus besoin. Je ne doute pas que la solidarité sera au rendez-vous. 

Mais les dispositifs ne suffisent pas si la culture managériale n’évolue pas en parallèle. Le rôle du manager est déterminant. Repérer les signaux faibles, accueillir la parole sans intrusion, instaurer un climat de confiance : autant de compétences qui s’apprennent. Former et sensibiliser l’encadrement à ces réalités est une priorité. Un salarié aidant qui se sent compris et soutenu sera plus en mesure de tenir son rôle. Il développera aussi des compétences transférables précieuses : savoir gérer des priorités dans l’urgence, arbitrer entre des contraintes contradictoires, garder son sang-froid sous pression, trouver des solutions créatives dans des situations complexes. Ces aptitudes sont à valoriser dans une équipe de travail. 

« Être aidant, c’est aussi apprendre la patience, la capacité d’écoute et l’empathie. »


Être aidant, c’est aussi apprendre la patience, la capacité d’écoute et l’empathie : des qualités humaines qui enrichissent les relations professionnelles et renforcent la cohésion collective. De la même manière, les managers qui accompagnent des collaborateurs aidants développent eux-mêmes de nouvelles compétences : plus de souplesse dans l’organisation, une attention accrue aux signaux faibles, une meilleure compréhension des fragilités qui peuvent toucher chacun d’entre nous. Il en résulte un cercle vertueux : en reconnaissant et en valorisant ces compétences acquises dans la sphère privée, nous renforçons la richesse humaine et la bienveillance de l’ensemble de l’organisation.

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