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« Un entraineur ne fait rien tout seul, il a besoin d’un staff soudé autour de lui. »

SEMAINE DES MÉTIERS DU SPORT. Ex-footballeur professionnel devenu entraîneur, Jocelyn Gourvennec a marqué l’histoire de l’équipe de Guingamp. En attendant de retrouver un poste d’entraineur, il intervient dans le monde de l’entreprise pour échanger sur les méthodes qui lui ont permis d’augmenter la performance de ses joueurs. Lors d’une conférence à l’Université du management de Pôle emploi, il a partagé sa vision d’un management efficace et épanouissant.

Publié le  23/11/2023

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Quelles sont les qualités d’un bon entraîneur ?

Jocelyn Gourvennec : Pour être entraineur aujourd’hui, il est nécessaire de réaliser un mix de différentes compétences. On doit d’abord avoir une vision claire de ce que l’on veut mettre en place et bien l’expliquer à son groupe. L’équipe dans son ensemble doit comprendre et appliquer ce que souhaite l’entraineur, et chaque joueur doit savoir ce qu’il a à accomplir à son poste et pour l’équipe. Ensuite, l’entraineur, avec son staff, doit élaborer des situations d’entrainements adaptées, à travers des exercices et des mises en place tactiques qui peuvent être vus comme des « simulations », permettant aux idées de jeu de « diffuser » chez les joueurs. Il est important aussi d’être « psychologue », à savoir d’être dans l’écoute et l’empathie pour apprendre à connaître ses joueurs et être en mesure de bien gérer son vestiaire. Enfin, bien communiquer en interne et vis-à-vis de l’environnement (public et médias principalement) donne du relief aux différentes actions menées avec son équipe.

Quelles sont les similitudes entre les fonctions de manager et d’entraîneur ?

J. C. : L’entraineur est à la fois un éducateur et un manager. Partager sa vision, mais aussi ses valeurs, est fondamental. Et fédérer autour d’un projet, quel qu’il soit et quel que soit le niveau, est un vrai travail de manager auquel l’entraineur doit être attentif.

Comment inciter ses collaborateurs à être dans le dépassement de soi ?

J. C. : Un entraineur ne fait rien tout seul, il a besoin d’un staff soudé autour de lui. En montrant le chemin à suivre, en donnant l’exemple et en responsabilisant chacun dans sa tâche et dans son rôle, le manager a de bonnes chances de voir ses collaborateurs donner leur maximum.

« Un entraineur impulse, guide, conseille et se doit de faire ce qu’il dit, sinon ça ne marche pas... »


Comment favoriser la performance individuelle sans nuire au groupe ?

J. C. : L’entraineur alterne en permanence les interventions collectives et les entretiens individuels, formels ou informels (que ce soit avec les joueurs ou les membres du staff). Voir les joueurs en aparté permet toujours de renforcer le discours fait au groupe dans son ensemble. L’entraineur doit toujours être attentif au fait que les axes de progression de chaque joueur doivent être réalisés pour devenir meilleur pour l’équipe. Personne n’est au-dessus de l’équipe. La progression de chacun se voit dans la production lors des séances et des matchs et peut s’apprécier à travers les nombreuses datas que l’on reçoit. Mais les datas ne disent pas tout : il n’y a pas de datas pour les qualités humaines et l’état d’esprit. Le joueur doit toujours mettre son état d'esprit au service du collectif. La performance d’ensemble est à ce prix.

Comment faire naître esprit d’équipe et solidarité au sein d’un groupe ?

J. C. : Je crois beaucoup à la valeur de l’exemple. Un entraineur impulse, guide, conseille et se doit de faire ce qu’il dit, sinon ça ne marche pas... Être intransigeant sur le respect des règles de vie et sur le respect du plan de jeu en match, c’est la même chose. On s’investit pour l’équipe. On se doit d’être attentif à cela. C’est là-dessus que se construit un état d’esprit. Si les joueurs s’approprient la mentalité, la discipline et la vision globale de ce que vous cherchez à mettre en place, alors une bonne part du chemin est faite!

Comment encourager ses collaborateurs à s’exprimer sans nuire à l’esprit d’équipe ?

J. C. : Il y a une différence entre exprimer son ressenti et montrer ses états d’âme. Dire ce que l’on pense pour faire progresser le groupe ou l'organisation est toujours positif, et l’entraineur doit encourager chacun à s’exprimer. En revanche, avoir des états d’âme, ce n’est jamais très bon, car vous exprimez alors des émotions souvent négatives et généralement égocentrées. Ces états d’âme doivent être traités avec beaucoup d’attention et de sérieux, car il ne faut pas qu’ils « polluent » l’atmosphère. Par opposition, il est toujours intéressant d’encourager l’expression pour que ça profite à tous.

« Les entretiens individuels, suivis de "points d’étapes" avec des feed-back, mais aussi l’observation au quotidien, sont des outils intéressants pour percevoir à quel niveau d’adhésion au projet se trouve chacun. »


Comment favoriser l’adhésion de chaque individu à un projet collectif ?

J. C. : Les entretiens individuels, suivis de « points d’étapes » avec des feed-back, mais aussi l’observation au quotidien, sont des outils intéressants pour percevoir à quel niveau d’adhésion au projet se trouve chacun. Je suis convaincu qu’il est nécessaire d’être très clair dans l’expression de ce que l’on attend des uns et des autres. Ainsi, il est plus facile à corriger en amont si on s’aperçoit qu’un individu « n’y est pas ».

Comment gérer l’hétérogénéité d’un groupe ?

J. C. : Il existe toujours une nécessité d’efficacité et de performance. Le manager doit s’intéresser à ceux qui sont un peu plus en difficulté pour les aider à rester investis et engagés. Gérer ceux qui sont performants n’est pas difficile. Manager et s’investir pour les autres, ceux qui se trouvent en difficulté, c’est ce qui donne une plus-value à l’ensemble, car personne n’est laissé sur le côté.

Comment favoriser la montée en compétences des collaborateurs ?

J. C. : J’encourage toujours les membres de mon staff ou mes joueurs à chercher à progresser. C’est du conseil. S’intéresser à d’autres sports, d’autres techniques, d’autres cultures permet de s’ouvrir et donc de se donner les moyens de devenir meilleur. Responsabiliser chacun est aussi un bon moyen pour favoriser les progrès. Quand un individu se sent investi d’une mission et qu’il est mis en valeur, alors il donne le meilleur. Son meilleur ! J’ai été marqué par mon passage en tant que joueur au FC Nantes. Il était inscrit sur les murs dans différents endroits du centre d’entrainement la phrase suivante : « Celui qui renonce à devenir meilleur cesse déjà d’être bon ». J’ai toujours trouvé cette phrase inspirante et je ne l’ai jamais oubliée.

« Lorsque des éléments nouveaux apparaissent, si l’environnement ou la structure changent, se faire confiance et appliquer ses routines de réussite permet de garder un certain équilibre et de rester performant. »


Quelles sont les clés pour conduire un groupe à la performance ?

J. C. : Je ne crois pas à la recette magique. Si je devais faire une synthèse de ce que le manager doit réaliser pour que son groupe performe, je dirais que le manager doit : avoir une vision claire de sa stratégie et des tâches à accomplir ; être exigeant quant à l’investissement de tous pour l’équipe (personne n’est au-dessus de l’équipe) ; être dans l’écoute et l’empathie et être ferme au moment de prendre des décisions (je décide et je m’y tiens). Le manager doit aussi être capable de s’adapter pour réajuster sa stratégie si besoin (plan A, plan B, plan C si nécessaire…).

Comment créer les conditions d’un épanouissement personnel de ses collaborateurs ?

J. C. : En tant que manager, pour permettre à chacun de s’épanouir dans son métier, on peut agir sur quatre facteurs : gérer le temps de travail et des plannings afin de laisser de la place pour faire des choses différentes (sport sur le lieu de travail, du temps pour sa famille…) ; donner du sens à ce que nous faisons en expliquant les choses de manière transparente ; s’intéresser à chaque individu que l’on manage en lui portant de l’attention et en s’intéressant à ses tâches ; respecter ses engagements pour donner du poids à la parole et aux messages que l’on porte. Quand on réunit ces conditions, chacun trouve de l’intérêt à sa mission et des raisons d’avancer.

Comment résister à la pression, même dans un environnement stressant ?

J. C. : Le meilleur moyen de faire abstraction de la pression est de se concentrer au maximum sur sa tâche. Essayer de bien maîtriser ce que l’on a à faire est primordial. Ainsi, vous agissez sur ce que vous pouvez maîtriser et cela renforce l’estime de soi. Il est bien-sûr important de connaître les enjeux et de les accepter. Mais il est bon aussi de se mettre dans sa bulle, parfois avec ses collaborateurs, pour faire face aux défis qui se présentent. On est toujours plus fort ensemble que seul.

Comment aider son équipe à faire face au changement ?

J. C. : Là encore, il est important face aux incertitudes que les changements vont amener de se concentrer sur sa tâche et d’avoir confiance en ses points forts, les choses que l’on fait bien. Les choses que l’on peut améliorer évoluent positivement quand on renforce sa capacité à utiliser ses points forts. Lorsque des éléments nouveaux apparaissent, si l’environnement ou la structure changent, se faire confiance et appliquer ses routines de réussite (points forts) permet de garder un certain équilibre et de rester performant.

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