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« Faire du business mais avec du sens, c’est possible ! »

Youssef Achour, président de UpCoop, défend un modèle d’entreprise de plus en plus en phase avec la société. UpCoop, en tant que société coopérative et participative (SCOP) à mission est un de ces modèles singuliers.

Publié le  29/11/2024

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La coopérative est-elle une alternative à l’économie mondialisée ?

Youssef Achour : Le système coopératif existe depuis des siècles. Il s’est adapté au monde des affaires. Nous sommes une entreprise classique qui se bat avec les mêmes armes que ses concurrents. Simplement, le facteur humain est prioritaire par rapport au facteur financier. Notre business, nous le faisons avec du sens. Et c’est possible, la preuve ! UpCoop fête cette 2024 les 60 ans de la Scop (Société coopérative de production) qui est une société à mission et qui se place à la tête d’un groupe de taille mondiale.   

« Le facteur humain est prioritaire par rapport au facteur financier ».


Cet anniversaire a-t-il une signification symbolique ?

Y.A : Oui, car 60 ans, ce n’est pas rien pour une entreprise, a fortiori pour une coopérative, c’est-à dire-détenue par ses salariés. C’est un signe de pérennité et de résilience. Nous sommes l’une des seules coopératives, en France, à avoir un rayonnement mondial avec une présence dans 25 pays et plus de la moitié des collaborateurs travaillent à l’international. Cela fait de nous un acteur majeur de l’Economie sociale et solidaire, qui a longtemps été considérée comme plutôt secondaire. Aujourd’hui, ce monde de l’ESS représente 10 % du PIB et 10 % des emplois en France. 

« Aujourd’hui, ce monde de l’ESS représente 10 % du PIB et 10 % des emplois en France »


Quelle est votre activité ?

Y.A : UpCoop est un émetteur de titres de services. Nous créons à destination de plus de 80 000 entreprises privées, acteurs publics ou associations, des solutions de paiement qui ont un impact social et local. Titres-restaurants, cadeaux, culture, versement de l’aide sociale etc. pour des populations identifiées et en vue d’une utilisation locale mais en incitant à une consommation plus responsable. Nous sommes donc une entreprise sociale et nous avons la chance d’être en phase entre ce que nous sommes et ce que nous faisons puisque les produits que nous produisons ont justement une utilité sociale. Au quotidien, 7,6 millions de salariés utilisent des titres de paiement UpCoop. 300 000 commerçants les acceptent en France. 

Ce modèle social est-il pérenne ?

Y.A : Une coopérative est une entreprise dans laquelle le facteur humain est prioritaire par rapport au facteur financier. Nous avons un engagement sociétal. La nouvelle génération de ceux qui entrent sur le marché du travail est très sensible, bien plus qu’avant, à cet engagement qui a du sens. C'est-à-dire une entreprise qui a accepté les règles du marché mais pas les règles selon lesquelles c’est le capital financier qui régit la gouvernance de l’entreprise. 

Comment cela se traduit dans le fonctionnement interne d’UpCoop ?

Y.A : Nous avons une politique RSE en interne qui se traduit par un mode de gouvernance très démocratique. En effet, les salariés deviennent sociétaires au bout d’un an, cooptés lors d’AG annuelles. Ils sont associés aux grandes décisions, c’est-à-dire qu’une personne égale une voix. Le Conseil d’administration est constitué de salariés élus et peut être révoqué tous les quatre ans par les sociétaires. Enfin, la valeur créée est partagée à parts égales. La participation, la part des dividendes sont les mêmes pour moi que pour un salarié. 

Cela ne vous ralentit pas dans la course avec vos concurrents ?

Y.A : Avec ce système, nous n’allons peut-être pas plus vite que nos concurrents, mais il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Nous acceptons de prendre ce temps de la construction collégiale plutôt que de céder au diktat de l’urgence. Et à terme, nous arrivons au même résultat que ces concurrents. Notre rapport au temps n’est pas le même. Nous sommes prêts à consacrer de l’investissement qui va rapporter dans 4 ou 5 ans plutôt que de mettre en place immédiatement des plans de restructuration ou de réorganisation. 

Y.A : De plus en plus de salariés concilient l’évolution professionnelle avec des objectifs sociétaux et environnementaux et un modèle de fonctionnement qui les associent aux décisions, même stratégiques. Les indicateurs et statistiques montrent que le niveau de survie des SCOP est bien supérieur à celui des entreprises qui adoptent des organisations capitalistiques plus classiques. Et le niveau d’arrêt d’activité est très faible. Nous sommes un modèle résilient et en croissance... Qui fête ses 60 ans ! 

« De plus en plus de salariés concilient l’évolution professionnelle avec des objectifs sociétaux et environnementaux et un modèle de fonctionnement qui les associent aux décisions, même stratégiques ».