« Le bâtiment, ce sont des métiers qui vous construisent ! »

Comment évolue le secteur du bâtiment en Grand Est ?

Stéphane Rozzi - Côté économique, la construction neuve résidentielle se stabilise en Grand Est après deux ans de baisse. En revanche, le non résidentiel est en baisse. Ce contexte économique fragilisé entraîne inévitablement une baisse de l’intérim et de l’emploi salarié.  Mais le bâtiment, c’est aussi une filière qui se renouvelle, en termes de métiers, de gestion des déchets, de transition écologique. On se transforme pour faire face aux défis, on s’adapte.

Justement quels changements notez-vous pour les métiers du secteur ?

Manuel Regler – On ne construit plus aujourd’hui comme on construisait hier. On note notamment une augmentation de la préfabrication pour faire face aux coûts de la construction qui ont explosé par rapport aux évolutions réglementaires et normatives. Aujourd’hui, des dalles arrivent directement sur le chantier, des salles de bains terminées intègrent directement les bases de logement… On industrialise de plus en plus la construction, créant ainsi de nouveaux métiers plus qualifiés. Bien entendu, on aura toujours besoin d’ouvriers maçons mais ce métier va évoluer vers plus de qualification.

Stéphane Rozzi - Grâce à l’IA et à l’arrivée de drones notamment, le métier de métreur, par exemple, va considérablement changer. On utilise aujourd’hui des imprimantes 3D géantes pour construire des bâtiments, comme par exemple pour le projet VillaSprint de Reims pour lequel un immeuble collectif de deux étages a été construit en béton 3D. Les ouvriers maçons deviennent des opérateurs, un peu comme dans l’industrie.

Malgré cette évolution des métiers, pourquoi recruter reste parfois difficile ?

Manuel Regler - Le BTP souffre encore aujourd’hui de cette image de «travail pénible», en extérieur, difficile… Bien sûr, cela existe mais ça s’améliore énormément grâce aux nouvelles technologies et aux avancées techniques. Par exemple, de nombreux dispositifs permettent de mieux supporter le travail sous la chaleur ou dans le froid ; des exosquelettes permettent de soulever des charges et de travailler sans s’abimer la santé. On travaille énormément sur les conditions de sécurité à travers la formation, la sensibilisation et l’accompagnement. La sécurité est un enjeu fort pour la FFB, comme la RSE d’ailleurs.

Stéphane Rozzi – C’est un travail permanent. Aujourd’hui, les métiers manuels ne sont plus des métiers naturels. Notre société est virtuelle, basée sur la dématérialisation, le téléphone, la sédentarisation également. Les générations qui arrivent manipulent plus facilement une tablette qu’une pelle. C’est juste une évolution sociétale. Mais même avec l’IA, on aura toujours besoin de gens pour travailler sur les chantiers, construire, bâtir, tailler les pierres… En permanence, et c’est un peu le sens de la promotion des métiers faite durant la Semaine des métiers du BTP, il faut expliquer, faire de la pédagogie, montrer les chantiers, ouvrir les CFA aux jeunes pour qu’ils découvrent le monde du bâtiment. De même, les chefs d’entreprises doivent également faire de la pédagogie vis-à-vis de leurs compagnons et de leurs salariés, prendre des stagiaires dans leurs entreprises, les tutorer correctement.

Que diriez-vous à un (e) jeune pour l’inciter à travailler dans le bâtiment ?

Manuel Regler – Le bâtiment, ce sont des métiers qui vous construisent ! (sourire) On innove, on digitalise, on se préoccupe de santé, de sécurité, d’environnement. Aujourd’hui les nouvelles générations sont très sensibles à la cause environnementale. Quand on leur parle décarbonation ou matériaux biosourcés, ça les intéresse. On travaille également énormément sur la féminisation de nos métiers. Et on progresse car on a de plus en plus de femmes dans la gestion de chantier, la conduite de travaux, l’ingénierie… De plus en plus de jeunes femmes entrent dans nos CFA pour apprendre les métiers de carreleur, peintre, plombier etc. Une femme exerçant un métier du bâtiment, aujourd’hui, ce n’est plus exceptionnel. Côté salaires et avantages sociaux, notre branche se situe plutôt bien. Côté évolution de carrière également. Notre public va du CAP au niveau ingénieur, nous avons une filière de formation complète. D’ailleurs, on peut entrer avec un CAP et sortir ingénieur ! Notre réseau de BTP CFA propose un grand nombre de filières d’apprentissage sur l’ensemble des métiers recherchés actuellement. Ce sont de réelles opportunités pour les jeunes ou le public en reconversion, des métiers très concrets qui ont du sens. Notre opération, Les coulisses du bâtiment, a justement vocation à montrer tout ce qu’on peut faire sur un chantier, aux jeunes mais également aux demandeurs d’emploi, avec la collaboration de France Travail.

Comment travaillez-vous avec les équipes de France Travail Grand Est ?

Manuel Regler - Nous travaillons ensemble sur la Semaine des métiers du bâtiment et des travaux publics bien sûr mais également sur des projets tout au long de l’année. Nous faisons notamment la promotion des services de France Travail pro à nos fédérations départementales pour qu’elles relaient aux entreprises adhérentes. La FFB tient à les informer de tout ce que France Travail peut faire pour eux. On partage beaucoup d’informations avec l’équipe sectorielle de la direction régionale de France Travail Grand Est. Il y a un très bon partenariat entre nos organisations.